الأحد، 2 يوليو 2017

Les philosophes face à la mort




Les philosophes face à la mort

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La mort est l’horizon indépassable de toute vie. Comment les philosophes appréhendent-ils cette réalité ? Les positions divergent. Petit panorama.
■ Platon
La mort n’est que la séparation de l’âme d’avec le corps
Dans le Phédon, Platon relate le dernier jour de Socrate, condamné à boire la ciguë, qui explique à ses amis peinés de le voir bientôt mourir : « Est-ce autre chose que la séparation de l’âme d’avec le corps ? On est mort quand le corps, séparé de l’âme, reste seul, à part, avec lui-même, et quand l’âme, séparée du corps, reste seule, à part, avec elle-même. » L’âme de l’homme de bien qui meurt rejoint le lieu intelligible. La mort nous délivre des tourments du monde sensible, les maladies, la douleur… et c’est pourquoi « le corps est le tombeau de l’âme » (sôma sêma) (Cratyle). Au fond, à la mort, on n’enterre que le corps. Pour les vrais philosophes, la mort, explique Platon, n’est donc que la libération de l’âme.

Les stoïciens
« Que philosopher c’est apprendre à mourir » (Cicéron)
Cette devise stoïcienne, Montaigne, on le sait, la reprendra dans ces Essais. Que veut-elle donc dire ? Philosopher, c’est apprendre à mourir car c’est comprendre que la mort est non un mal mais une nécessité des choses : « Ne méprise pas la mort, mais sois content d’elle, puisqu’elle est une des choses que veut la nature. (…) Il est d’un homme réfléchi de ne pas s’emporter violemment contre la mort ni de la dédaigner, mais de l’attendre comme un événement », explique Marc-Aurèle (Pensées, IX, 3). « Ce qui est un bien, ce n’est pas de vivre, mais de vivre bien. Voilà pourquoi le sage vivra autant qu’il le doit, non pas autant qu’il le peut » (Sénèque, Lettres à Lucilius, livre VIII, lettre 70). » La mort est un processus naturel qu’il faut accepter. Composé des quatre éléments que sont l’eau, la terre, l’air et le feu, l’homme en mourant retourne d’où il vient. On ne doit craindre ni sa propre mort ni celle des autres. Pour cela, il faut s’y préparer par des exercices spirituels et de la méditation. « Bien voir toujours au total combien sont éphémères et sans valeur les choses humaines ; hier un peu de morve ; demain une momie ou des cendres. Ce petit instant du temps de la vie, le traverser en se conformant à la nature, partir de bonne humeur, comme tombe une olive mûre, qui bénit celle qui l’a portée et rend grâce à l’arbre qui l’a fait pousser (Marc-Aurèle, Pensées, IV, 48). »
■ Épicure
« La mort n’est rien pour nous »
De manière radicale, Épicure entend pulvériser la peur de la mort. « Familiarise-toi avec l’idée que la mort n’est rien pour nous, car tout bien et tout mal résident dans la sensation : or, la mort est la privation complète de cette dernière (…). Ainsi, celui des maux qui fait le plus frémir n’est rien pour nous, puisque tant que nous existons, la mort n’est pas, et que la mort est là où nous ne sommes plus. » Reste à enlever le désir de l’immortalité. C’est ce à quoi parvient le sage : « La vie ne lui est pas à charge, et il n’estime pas non plus qu’il y ait le moindre mal à ne plus vivre. De même que ce n’est pas toujours la nourriture la plus abondante que nous préférons, mais parfois la plus agréable, pareillement, ce n’est pas toujours la plus longue durée qu’on veut recueillir, mais la plus agréable (Lettre à Ménécée). »
■ Spinoza
« L’homme libre ne pense à aucune chose moins qu’à la mort »
Spinoza va à l’encontre de toute une tradition philosophique qui depuis l’Antiquité ne cesse de rappeler l’importance de se préparer à la mort grâce à la philosophie. Pour Spinoza, l’essence de tout être est de persévérer dans son être. La sagesse est donc « une méditation non de la mort mais de la vie » (Éthique IV, 67). Songer à la mort ne peut conduire qu’à ressasser des idées tristes qui diminuent notre puissance d’agir. Il n’y a rien à attendre de bénéfique d’un tel ressassement. Pour Spinoza, la philosophie doit nous permettre de vivre dans la joie. Il récuse donc les stoïciens qui croient que l’homme peut avoir une totale maîtrise de ses émotions.
■ Schopenhauer
La mort est une délivrance
Obnubilé par la souffrance et la détresse humaines, Schopenhauer porte un regard pour le moins pessimiste sur l’existence : « La vie n’est qu’un combat perpétuel pour l’existence même, avec la certitude d’être enfin vaincus. Et ce qui leur (les hommes) fait endurer cette lutte avec ses angoisses, ce n’est pas tant l’amour de la vie, que la peur de la mort, qui pourtant est là dans l’ombre, prête à paraître à tout instant (Le Monde comme volonté et comme représentation). » Pourtant la mort ne doit pas être perçue négativement. Dans une perspective proche de celle de Bouddha, Schopenhauer appréhende la mort comme une libération : « La mort est le moment de l’affranchissement d’une individualité étroite et uniforme, qui, loin de constituer la substance intime de notre être, en représente bien plutôt comme une sorte d’aberration. » Le sage sait donc quitter l’existence sans peine.
■ Heidegger
Penser l’« être-pour-la-mort »
Heidegger constate que nous avons tendance à fuir la mort, à la banaliser ou à nous en détourner. Pourtant, affirme-t-il, nous sommes des « êtres-pour-la-mort ». La mort est constitutive de notre condition. Dès que nous sommes au monde, nous sommes assez vieux pour mourir. La mort est le noyau de notre existence, ce qui lui donne sens. Prendre conscience de notre mort future, l’accepter avec courage et lucidité, c’est ce qui nous permet d’accéder à une « vie authentique », au-delà des futilités, des banalités, de l’inessentiel.
■ Jankelevitch
La mort est impensable
La mort est un scandale pour la raison. Elle est quasiment impossible à imaginer, à se figurer. Le moment du passage, de l’instant mortel s’anéantit. Indicible et invivable, il rend impossible la conscience de la mort. Aucun savoir sur la mort n’est donc envisageable. On ne peut au fond dire la mort que de manière indirecte, par métaphore, par périphrase ou par euphémisme.


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